Imperceptiblement, la ligne de ce blog, -cave où devait s’entasser tous mes textes ne relevant pas du cinéma-, a dévié au profit d’un profil purement littéraire où seules sont désormais consignées mes notes de lecture. Ce n’est pas pour autant que je n’écoute plus de musique ou que je ne vais plus voir de concerts. Mais le temps m’est compté et je n’ai pas toujours le courage d’écrire.
Renouons cependant avec ma vieille habitude des comptes-rendus impressionnistes de concerts en retraçant un bref panorama de tous les spectacles auxquels j’ai assisté cette année (je parle en terme d’année scolaire puisque les « saisons culturelles » -passez-moi l’horreur de cette expression- fonctionnent ainsi).
1- Des découvertes locales à la renommée nationale
Le Bistrot de la scène est, à Dijon, un lieu très convivial qui accueille des concerts, des pièces de théâtre et divers type de spectacles (improvisations, représentations pour les enfants) Ce lieu, menacé de disparition depuis que le ministère de la Kultur (de droite) a coupé toutes les aides, permet aux petits groupes locaux de faire leur premiers pas.
C’est là que j’ai vu cette année les trapettistes, groupe dont la renommée ne dépasse sans doute pas les frontières de ma bonne région bourguignonne mais qui a le mérite d’enflammer les salles à chacun de leurs concerts (les ayant vu 7 ou 8 fois, je sais de quoi je parle !).
Malheureusement, après une dernière tournée très réussie et un spectacle autour de Pierre Perret que je regrette d’avoir manqué, un des membres du groupe s’en est allé. Un quatrième album a néanmoins vu le jour (prends ta main dans ma gueule) mais force est de constater que le cœur n’y est plus vraiment (l’album étant assez inégal malgré quelques très bons titres). Sur scène, le groupe fut privé, en plus, de son batteur et assura le spectacle à quatre ; jouant pendant une heure trente des morceaux que nous ne connaissions alors pas. En gros, c’était une « preview » de la tournée, pas désagréable mais manquant de l’énergie des précédents spectacles, malgré la générosité et l’humour de chaque membre du groupe. Maintenant que je connais les titres, je serais curieux de voir comment a évolué le spectacle…
Cette année, le Bistrot fêtait ses 20 ans. Pour célébrer dignement l’anniversaire, trois soirées exceptionnelles furent réservées au grand Jamait, artiste local qui a désormais conquis toute la France. J’y suis allé le deuxième jour et ce fut un très grand moment. L’ambiance intimiste (la salle doit contenir aux alentours de 200 places) sied parfaitement à ce grand chanteur qui, pour l’occasion, fit venir un certain nombre d’invités. Le soir où j’y étais, nous eûmes le plaisir de voir (et d’entendre) Daniel Fernandez (là aussi, c’est local !), Bastien Lallemant et Claire Joseph (C’est la vie de Jamait avec une voix féminine, c’est très bien), Mulet-Mulet, le fabuleux Nicolas Jules (je ne connaissais pas cet hilarant extra-terrestre) et Thiéfaine. Grand moment que la reprise de La fille du coupeur de joint par toute la bande, sans parler de ce moment exquis où Jamait demanda à Thiéfaine de jouer Confessions d’un never been sans répétition préalable. Nous eûmes le privilège de voir le chanteur suivre le texte de sa chanson sur… des boites de pizzas ! Ambiance chaleureuse (le public connaissant parfaitement les paroles de notre idole locale) et à la bonne franquette, présence incroyable sur scène de ce digne successeur des Brel et Aznavour et beauté des titres choisis ce soir-là. Soirée sublime.
Mon seul regret lors du concert de Jamait fut d’apprendre que, la veille, Aldebert était venu en personne pousser la chansonnette avec lui. Besançon, ce n’est plus tout à fait notre région mais nous n’en sommes pas loin aussi est-ce sans scrupule que je l’associe aux chanteurs « locaux ». Car après son passage l’an dernier au Zénith de Dijon, Aldebert est revenu présenter son nouveau spectacle. Ce que j’écrivais à propos de son dernier album (suivre les tags) s’est vérifié : si le disque les paradis disponibles est un tout petit peu décevant, les nouveaux titres gagnent en intensité sur scène et sont faits pour être entendus « live ». Rien à redire par rapport au précédent concert si ce n’est que notre bonhomme est toujours aussi génial face au public, réveillant en deux temps trois mouvements même les personnalités les plus rétives au fiesta des concerts. Son nouveau spectacle prouve qu’il a su se renouveler (fini l’Aldebert avec son cartable sur les épaules) et même progresser. Les quelques sketches d’introduction aux morceaux sont souvent désopilants (le hard rocker, la soirée disco…) et chaque titre a provoqué l’enthousiasme (signalons d’ailleurs une très belle reprise de l’orage de Brassens). Je ne le redirai jamais assez : allez découvrir Aldebert sur scène, c’est assez grandiose (notons au passage qu’en première partie, nous avons pu entendre Ours qui commence à bien marcher sur les ondes…)
2- Du côté des neurasthéniques.
L’amitié exige parfois de lourds sacrifices. Ainsi, pour accompagner un ami qui a la gentillesse de toujours me conduire lorsque nous allons aux concerts, je me suis tapé le spectacle de Jean-Louis Murat. Et ce n’est pas la première fois ! Sans être allergique à toutes ses chansons, je dois reconnaître que ce n’est pas ma tasse de thé. D’autant plus que le bonhomme n’a pas beaucoup de charisme sur scène, enchaînant les titres sans décocher un mot. J’avoue que le pseudo rebelle dont les inrocks font chou gras m’agace, se comportant comme un esclave salarié gagnant son pain sur scène mais ne semblant y prendre qu’un plaisir modéré. Personne ne l’oblige à se produire devant un public si ça l’ennuie !
Dans le même style, j’ai re-re-revu Miossec, pour les mêmes raisons. Musicalement, je préfère sa performance à celle de Murat (disons que c’est plus « rock ») mais là encore j’ai été agacé par cette incapacité à faire vibrer le public si ce n’est en racontant toujours la même histoire périmée (le chanteur se serait fait casser la gueule dans une boîte dijonnaise fermée depuis bientôt 7 ans !). De plus, Miossec a tendance à s’embrouiller dans ses paroles et doit suivre ses chansons à l’aide d’un chevalet ! Une fois, il nous a fait le coup de partir au bout d’une heure, sans le moindre rappel. Cette fois, le concert a duré pilepoil une heure trente (eh oh ! Faudrait voir à pas faire d’heures sup’) mais ne m’a guère enthousiasmé.
3- Festivus, festivus
A l’opposé de ces deux chanteurs dépressifs sous tranquillisants, j’ai découvert avec un grand plaisir deux groupes survoltés qui ont embrasé deux soirées mémorables. Le premier ne m’était pas inconnu puisque je possède quelques CD de La ruda salska. Pour l’occasion, j’avais acheté leur dernier album la trajectoire de l’homme canon que je considère comme une assez belle réussite même si une première écoute donne l’impression de redite. Sur scène, ils sont impressionnants, ne laissant pas une seconde pour souffler et parvenant à déchaîner une foule très jeune et totalement conquise (pas une seconde n’ont cessé les fameux slams que l’on voit lors de certains concerts). Le groupe a profité de ce concert pour reprendre leurs « tubes » les plus célèbres (ceux de leur meilleur album : l’art de la joie) et nous ont régalé de leur cocktail ska (les nombreux cuivres) et rock (guitares électriques saturées). Je pense qu’ils sont des dignes successeurs de la Mano négra de la grande époque !
A l’inverse, je ne connaissais Marcel et son orchestre que de nom (excepté leur titre phare les vaches) . Et bien ça ne m’a pas gêné un seul instant pour apprécier ce concert également déchaîné où le public (très jeune, encore une fois) avait pris soin de se déguiser, de se vêtir de robes multicolores et de perruques agressives. Sur scène, les lillois sont, eux aussi, assez fabuleux et ils ont beaucoup d’énergie à revendre en mélangeant toutes sortes de styles (rock, ska, punk, ragga…) et en inventant des mots d’ordre totalement délirants (délicieux morceau intitulé la jeunesse emmerde Nelly Holson !)
Deux groupes à recommander chaleureusement pour les amateurs de soirée festive.
4- L’apothéose
C’était hier puisque étaient réunis deux des groupes phares de la nouvelle scène alternative française et peut-être mes deux préférés : la rue kétanou et les ogres de barback.
L’évènement eut lieu au Zénith, lieu que je ne prise pas tellement puisque après une première saison assez riche (Bénabar, Cali, Fersen, Luke et Deportivo, Aldebert, Louise Attaque…), la deuxième fut d’une affligeante médiocrité, accueillant uniquement les débris nullissimes capables de faire entrer de la monnaie (les ignobles Sardou, Hallyday, Obispo, Bruel ou encore la Star academy). Impression étrange de voir ces deux groupes habitués des petites salles dans un lieu aussi vaste et bondé. La seule petite pointe de déception vint d’ailleurs de là : l’atmosphère m’a paru moins chaleureuse que celle que j’avais pu à connaître avec les Ogres en les découvrant sous leur chapiteau à Chalon. Rien à dire pour les groupes : La rue kétanou nous a proposé quelques nouveaux titres (pas ce qui m’a semblé le plus emballant) et a enchaîné sur quelques classiques mettant en joie une foule conquise. Si manquait certains titres que j’affectionne particulièrement, nous avons eu droit au Cigales, aux Mots (avec un public répondant avec enthousiasme), à la très belle fiancée de l’eau et aux Hommes que j’aime. Par rapport à l’album live que je possède, je n’ai cependant pas vu beaucoup de différence et c’est le seul bémol que j’apporterais à cette belle prestation.
Je parlerai sans doute prochainement du dernier album des Ogres. Je ne les avais pas vu depuis 4 ans et ça m’a fait rudement plaisir de recroiser leur chemin. Curieusement, je n’ai pas eu l’impression d’une « nouvelle tournée » puisque seuls quatre titres du dernier CD ont été joués, et pas forcément les meilleurs (la pleurnicharde et politiquement correct Jérôme prenant la place de la sublime Il ne restera rien ou de l’entraînante Corinna). Là encore, j’ai eu l’impression d’entendre certains moments des deux albums live récents qu’a sorti le groupe.
A côté de ça, c’est superbe ! Les deux frères et leurs deux sœurs sont des instrumentistes hors pair et savent jouer de tout (ils changent d’instruments au cours des morceaux et ont recours au plus insolite, de la scie à cette espèce de vélo à percussions). Mis à part un passage très politiquement correct (la diffusion du film des enfants de sans-papiers ! Misère !), je n’ai pas vu le concert passer et les Ogres nous gratifièrent d’un splendide final en forme de « medley » chanté sans micro (ils laissèrent le public entonner Rue de paname) . J’ai hâte de les revoir dans une salle à dimension humaine pour profiter pleinement de leur mise en scène (c’est dur quand vous êtes loin de la scène, derrière des costauds d’1 mètre 95 !)
Libellés : Aldebert, concert, Jamait, La Ruda Salska, La rue kétanou, Les trapettistes, Marcel et son Orchestre, Miossec, Murat, Ogres de barback, Ours