La cave du Dr Orlof

Notes en vrac

samedi, juillet 19, 2008

En hommage à Siné...

« LES ISRAELIENS

Les Israéliens sont appelés ainsi parce qu’ils sont juifs. C’est-à-dire qu’ils ont le nez crochu, les doigts crochus, les yeux crochus, et la banane pelée. Pourquoi les doigts crochus ? Parce que, quand les Israéliens sont encore bébés, les rabbins leur crochètent les doigts à des fins religieuses. Mais c’est aussi une question d’hygiène. C’est comme les musulmans qui ne mangent pas de sanglier à cause des risques de maladie parasitaire, je pense notamment au ténia de Rivoire et Carret : c’est un produit Solitaire, donc un produit sûr, mais c’est plus épuisant qu’une branlette quand on n’a pas vraiment envie. Il y a deux sortes d’Israéliens : les Juifs d’Europe de l’Est ou du centre, qui ont l’air intelligent avec le front dégarni et même, quelquefois, les yeux bleus, et les Juifs moyen-orientaux qui ont souvent le genre étranger.

Les Juifs ne pensent qu’à gagner de l’argent en vendant des manteaux de fourrure. C’est pourquoi en Israël, il n’y a pratiquement que des fourreurs, et très peu de militaires.

Qu’ils soient conservateurs ou travaillistes, les Israéliens ont entre eux un point commun : ils ne mettent pas de moutarde dans la confiture de myrtille. Au Novotel, quand nous repérons un inconnu qui met de la confiture de myrtille sur son pain sans rien d’autre, avec cet air sûr de soi et dominateur qu’ont ces gens-là, nous devons changer de table.

Israël est un pays assez laid et mortellement ennuyeux. Dedans, il n’y a rien, et autour, c’est plein d’Arabes. La seule distraction des Israéliens, c’est The lamentations Wall, une boîte en plein air où on peut twister contre un mur en lisant un truc genre Coran dont le nom m’échappe à l’heure où j’écris ces lignes, si tant est qu’on puisse appeler cela écrire. Ca ressemble au Coran, mais ce n’est pas le Coran, ni du Canada Dry.

Bref, ce n’est pas un pays très rigolo, et l’on comprend mieux maintenant les motivations des occupants romains qui crucifiaient les clochards de gauche et les dieux de grand chemin, non point par anticléricalisme primaire, mais pour tuer le temps.

Parmi les grands hommes qui ont contribué à la création de l’Etat d’Israël, il faut citer M. Ben Gourion, dit le Lion du désert (pourquoi « le lion » ? Parce que « le renard », c’était déjà pris par Rommel), Mme Golda Meir, dite la Lionne du fromage (pourquoi du fromage ? Parce que c’est fromage ou désert), et Adolf Dayan, dit l’Amoché Dayan parce qu’il a un trou là.

Les Israéliens sont très propres sur eux, pour des juifs. Lire à cet égard le remarquable ouvrage de Mme Denise Fabre, Comment être belle et le rester (Presses de la Renaissance), dans lequel l’auteur révèle qu’un tampon périodique lavé au savon d’Israélien peut resservir vingt fois plus qu’un Coton-tige lavé au savon de baleine. L’Israélien ajoute l’éclat à la blancheur.

On voit donc à la lumière de ce témoignage ci-dessus que les Israéliens ne sont pas complètement nuls. Alors comme disait Himmler en visitant Auschwitz sous une pluie battante : « Ne boudons pas notre plaisir ».

En résumé, on peut dire que les Israéliens sont très pieux. Quand ils disent « A bas la calotte », ils ne parlent pas du couvre-tête. Alors, s’il vous plaît, je vous en prie. »

Vous aurez sans aucun mal reconnu l’un des succulents textes de Pierre Desproges réunis sous le titre Les étrangers sont nuls. Si j’ai exhumé celui-là, c’est pour rappeler que ces lignes ont été écrites dans… Charlie-Hebdo en 1981 (ce n’est quand même pas si vieux !). On peut rire de tout mais pas avec tout le monde, disait fort justement le génial humoriste (que j’ai vu, quand même, figurer dans un dictionnaire de citations antisémites ! On croit rêver !) et il est bien triste de constater que ce n’est plus possible désormais à Charlie-Hedo !

Santé, Siné !

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jeudi, novembre 22, 2007

Cruel, forcément cruel!

Le vice-consul (1965) de Marguerite Duras (Gallimard. L’imaginaire.1982)

Pour aborder la lettre D de ce nouvel abécédaire, j’avais d’abord songé à vous parler de Dantec mais, malheureusement, tous ses romans disponibles en promo avaient disparu. Je remets donc à plus tard ma petite causerie sur cet auteur « sulfureux » et j’embraye à nouveau sur un titre de la collection l’imaginaire déniché à vil prix dans un quelconque marché aux livres. Je précise ces données non par pingrerie mais parce qu’en temps normal, il faudrait s’y prendre de bonne heure pour me pousser à acheter un livre de la mère Duras.

Par honnêteté intellectuelle, j’ai tenté le coup et la lecture du Vice-consul m’a conforté dans mes préjugés contre l’écrivain.

Dans le Calcutta des années 30, un vice-consul anciennement en poste à Lahore est l’objet de toutes les conversations : on ignore les raisons qui ont présidé à son arrivée, les actes qu’il a commis par le passé et ce que lui réserve l’avenir. Lors d’une soirée de l’ambassade se croisent plusieurs silhouettes, notamment celle de la belle Anne-Marie Stretter, à qui le vice-consul déclare plus ou moins sa flamme…

Mine de rien, cette histoire tenait à cœur à Duras puisque mis à part le roman dont il est question ici, elle donna lieu à deux films : India song et Son nom de Venise dans Calcutta désert. Je sais que c’est toujours un peu facile mais lorsque j’ai soudain réalisé que j’étais en train de lire le roman dont était tiré ce soporifique pensum qu’est India song, j’ai songé au fameux mot de Desproges : « Marguerite Duras n’a pas écrit que des conneries. Elle en a aussi filmé. ». Et en lisant Le vice-consul me revenait également en mémoire ce ballet d’ectoplasmes errant dans une salle de balle, déclamant d’une voix blanche des dialogues maniérés à l’extrême et sans le moindre intérêt. J’ai revu toute cette raideur hiératique qui m’assomme chez Duras et qu’une nouvelle fois je n’ai guère supportée (à part la toute première partie du roman, une histoire de fugue d’une jeune mendiante enceinte, que j’ai trouvée un peu intrigante).

Le problème avec Duras (et un certain nombre d’artistes contemporains), pointé fort justement par les situationnistes, c’est qu’elle recycle d’une manière « spectaculaire » les avancées des avant-gardes pour n’en garder que les oripeaux. De la même manière que le dadaïsme a été récupéré publicitairement par le pop-art, Duras récupère les procédés « modernes » de l’écriture (narration brisée, recours aux voix « intérieures »…) sans jamais faire autre chose qu’exhiber ces signes de modernité.

Ses admirateurs risquent de me tomber dessus mais il n’y a aucune écriture chez Duras : juste des procédés et d’insupportables tics que tout le monde s’est amusé à parodier (forcément !). C’est totalement creux et d’une vacuité abyssale.

Ce que je vais dire va peut-être paraître très méchant mais il me semble que l’essence de cette littérature peut s’appréhender en voyant l’adaptation que Jean-Jacques Annaud a faite de l’amant. Le film n’est qu’une succession de cartes postales exotiques et il est d’une nullité sans nom mais il exprime parfaitement le vérité première de l’œuvre de Marguerite Duras : dépouillée de son vernis avant-gardiste (au fumet aujourd’hui bien faisandé !), il ne reste plus que des histoires à l’eau de rose tout juste digne d’une collection Harlequin

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mardi, novembre 14, 2006

Mettons un terme aux maîtres

Pierre Desproges. Réquisitoires du tribunal des flagrants délires. (Points Seuil-2006)

Ca sent les fêtes de fin d’année ! Voilà que même les éditions de poche sortent de jolis ouvrages en tirage limité. Si vous n’avez aucune idée pour un petit cadeau, ruez-vous sur cette édition intégrale des textes que Desproges prononça à la radio aux débuts des années 80 dans la fameuse émission de Claude Villers : c’est un pur régal.
Que dire qui n’ait pas encore été dit de Pierre Desproges si ce n’est que c’est le plus grand et qu’il nous manque cruellement à une époque où le rire a perdu toute sa dimension subversive et se trouve aux mains d’abjects nains rampants qui ne pensent qu’à lustrer les semelles des puissants afin de ne surtout pas perdre leur place dans les ridicules émissions télévisées où ils assurent leur service après-vente ? Qu’aurait pensé cet homme libre de tous ces laquais sans style et sans hargne, distillant leur «humour » mou et consensuel en prenant le plus de précautions possibles pour ne pas heurter les majorités silencieuses (quand ils ne se vautrent pas dans le plus puant des poujadismes comme l’immonde Bigard) ?

C’est durant ces réquisitoires qu’eut lieu la fameuse confrontation de Desproges avec Le Pen où l’humoriste offrit à la postérité une des seules définitions qui valent du rire en posant ses deux célèbres questions : peut-on rire de tout ? Et peut-on rire avec tout le monde ? Ses mots sont très célèbres mais je ne peux pas résister au plaisir de vous redonner sa réponse : «S’il est vrai que l’humour est la politesse du désespoir, s’il est vrai que le rire, sacrilège blasphématoire que les bigots de toutes les chapelles taxent de vulgarité et de mauvais goût, s’il est vrai que ce rire-là peut désacraliser la bêtise, exorciser les chagrins véritables et fustiger les angoisses mortelles, alors, oui, on peut rire de tout, on doit rire de tout. De la guerre, de la misère et de la mort. Au reste, est-ce qu’elle se gêne, elle, la mort, pour rire de nous ? »
Desproges aura passé sa vie à utiliser l’humour comme une arme contre la bêtise ou comme un moyen de mettre en valeur l’absurdité de la condition humaine. Lorsqu’il s’imagine dans la peau de Dieu, c’est pour annoncer son intention d’abolir tout simplement la mort. Mais pas pour tout le monde : « En effet, il me plait à penser qu’il me serait infiniment agréable de conserver le statut de mortel aux bigots de toutes les chapelles, aux militaires de carrières, aux militants hitléro-marxistes, aux lâcheurs de chiens du mois d’août, aux porteurs de gourmettes (ça, je supporte pas) et aux descendants de Tino Rossi dont rien ne permet de penser qu’ils hériteront de leur géniteur le moindre talent roucoulophonique mais enfin, on sait jamais. » On aura compris qu’elles furent les principales cibles de Desproges : l’armée, les dogmatiques de toutes chapelles, la gauche (les attaques contre les socialos venant d’accéder au pouvoir sont tellement visionnaires qu’on s’en pourlèche les babines), la droite, les coiffeurs, les racistes, les chanteurs, les sportifs, les handicapés patronymiques (le réquisitoire contre Jean-Jacques Debout est à pisser de rire), les hypocrites de toute espèce, les scouts, les étudiants, les snobinards et autres salonnards détenant les clés de la création artistique (« Ah, certes, Roger Coggio, vous êtes dur à jeter, mais comme rasoir vous êtes très efficace ! »)…
A côté de cela, Desproges n’hésite pas à rire de sujets graves pour souligner l’absurdité du monde et du sort qui est fait aux pauvres, aux vieux (« Tout d’abord, pour vieillir discrètement sans gêner les jeunes, persuadez-vous une bonne fois pour toutes que les vieux, sans être à proprement parler des sous-hommes, constituent humainement et économiquement la frange la moins intéressante d’une population »), aux étrangers ; ou encore pour interroger les horreurs du passé. Quand il évoque la seconde guerre mondiale, notre bonhomme se surpasse dans l’humour noir et grinçant. Qui oserait aujourd’hui aller aussi loin dans la dérision : « « C’est à ses vêtements élimés qu’on reconnaît le communiste », disait le regretté Heinrich Himmler, qui était toujours très propre sur lui. Himmler, je le précise à l’intention des jeunes et des imbéciles, n’était pas un gardien de but munichois, mais un haut fonctionnaire allemand que le chef de l’Etat de ce pays avait plus spécialement chargé de résoudre le problème de la surpopulation des commerçants en milieu urbain, par la création de voyages organisés gratuits. C’était un homme affable, capable d’une grande concentration, mais volontiers rieur et primesautier. Il avait de longues mains très blanches, il adorait les fleurs et les chiens de bergers, si possible allemands, avec pedigree.
Pendant la guerre, cet homme délicat préférait passer ses week-ends à Amsterdam plutôt qu’à Auschwitz, où les apatrides pissaient sur les tulipes. « Et puis d’ailleurs, disait-il en riant, on ne peut pas être à la fois au four et au moulin. » »
On se doute que de tels propos tenus par un lobotomisé du front national ne nous auraient pas décroché un franc sourire ! D’où la seconde idée qu’on « ne peut pas rire avec tout le monde ». Dans ses réquisitoires, Desproges se montre alors parfois plus agressif lorsqu’il s’agit de dégueuler son aversion pour la « presse people » ou contre les tenants du « bon goût culturel ». Plus étonnant, on le verra assez sévère pour quelqu’un comme Siné dont on aurait pu penser qu’il serait assez proche. Sauf qu’il reproche au dessinateur son absence de doute (mêmes cibles depuis 30 ans) et c’est peut-être à ce moment que se livre le plus cet individualiste humaniste (à la Brassens) angoissé. Ce qu’il fuit comme la peste, c’est les groupes, les chapelles et les dogmes.

C’est cette liberté de pensée qui nous manque si cruellement. Et ce style. Car ce qui apparaît en relisant ces textes où se mêlent les calembours et jeux de mots les plus foireux (donc, les meilleurs) et des réflexions d’une rare profondeur (toujours sous couvert du rire le plus franc) ; c’est que Desproges était un vrai styliste, amoureux éperdu de la langue et de ses subtilités (voir les beaux hommages qu’il rend à Vialatte)
J’aimais bien Coluche mais soyons honnête : ses sketches sont aujourd’hui un peu datés et reposent trop sur des événements ponctuels. Desproges, non. S’il requiert contre des individus déjà oubliés 25 ans après, son humour n’a pas pris une ride et nous enchante.
C’est tout bonnement indispensable et génial !

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