Lectures de septembre 2017
44- Ascendant Sagittaire (2001) de Gérard Guégan (Parenthèses, 2001)
Gérard Guégan fut le fer de lance
de deux des plus belles aventures éditoriales de la fin des années 60 et des
années 70. En 1968, il créé avec Gérard Lebovici les mythiques éditions Champ
Libre auxquelles il consacrera deux volumes (Cité
Champagne, esc. I, Appt. 289, 95- Argenteuil (Champ libre 1 : 1968-1971) et
Montagne-Sainte-Geneviève,
côté cour : éditions champ libre 2 (1972-1974)). Après la
rupture douloureuse avec Lebovici et son éviction de Champ Libre, Guégan et ses
complices habituels (Raphaël Sorin et Alain Le Saux) décident de relancer Le
Sagittaire, la fameuse maison fondée après la première guerre mondiale et qui
accueillit en son sein de nombreux écrits surréalistes (entre autres).
En 1975, Le Sagittaire renaît de
ses cendres et Guégan poursuit le travail éditorial mené à Champ Libre en
multipliant les collections comme autant de champs d’intervention. La
littérature contemporaine (Bruckner, Hallier, Bukowski, Martinet) se mêle à des
essais percutants (le génial Lâchez tout ! de la grande Annie Le
Brun), la littérature populaire (thriller et SF dans la lignée de la collection
Chute Libre) avec des romans de Dick, Malzberg et Kainen croise diverses aventures
des années 70 comme les hippies et la contre-culture (Les Déclassés de
Bizot) et les débuts du punk avec Alain Pacadis.
Entre anecdotes et introspection,
Guégan revient sur cette singulière aventure avec la verve qui lui est
coutumière. Editer, pour lui, c’est entrer en guerre à la fois contre le milieu
de l’édition mais également contre la société dans son ensemble. A travers son
témoignage, c’est également toute une époque qui se dessine en filigrane :
les feux mal éteints de mai 68, les contradictions de l’extrême-gauche, la
volonté d’en découdre à tout crin avec le vieux monde, quitte à en passer par
la violence… Au fond, Ascendant Sagittaire aurait pu porter comme
sous-titre le nom de la revue littéraire que Guégan lance également dans les
années 70 : Subjectif. Son
livre est effectivement une célébration de la plus débridée des subjectivités.
En ce sens, et même si de nombreuses choses les séparent, Guégan et son équipe
ont su, à travers l’aventure du Sagittaire, retrouver un peu de l’esprit des
surréalistes…
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45- Chers absents (2017)
d’Anne Teyssèdre (Editions Persée, 2017)
Pour plus d’informations sur ce beau livre, voir ma note précédente.
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46- Les Grelots de la
folie (1969) de Dominique Arly (Fleuve Noir, collection Angoisse, 1969)
Un drame de la passion dont je parlerai dans le cadre d’un
autre projet.
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47- Association de
malfaiteurs (2017) Collectif (Editions Tristram, 2017)
En 1987 naissaient à Auch les
éditions Tristram, une petite maison indépendante qui a su pendant trois
décennies maintenir le cap et constituer un magnifique catalogue où l’on croise
Burroughs, Ballard, Laurence Sterne, Mark Twain, Eric Losfeld, Kenneth Anger et
bien d’autres encore. Pour souffler les bougies de leur trentième anniversaire,
Sylvie Martigny et Jean-Hubert Gailliot nous proposent un fascinant kaléidoscope
pour rendre compte de leurs activités. Le recueil débute par une superbe
nouvelle signée Nina Allan avant de se poursuivre par des textes de natures
très diverses : un discours piquant d’Enzensberger sur les manifestations
culturelles, une lettre de Maurice Girodias, des tracts signés Losfeld, une
superbe évocation de Kerouac par Bernard Wallet, fondateur des éditions
Verticales, un autoportrait de Pierre Bourgeade, des critiques littéraires
signées Chevillard et Sollers (sur, respectivement, Le Tutu de Princesse Sapho et les Poésies d’Isidore Ducasse), etc. A cela il faut ajouter des
entretiens (Medhi Belhaj Kacem revient sur son roman Irène Lepic), des dessins, un essai pointu sur Laurence Sterne et d’amusantes
questions d’un traducteur. Cet ensemble hétéroclite est à la fois passionnant
et traduit parfaitement la singularité du catalogue Tristram qui ne privilégie
pas une période particulière (les « classiques » comme Sterne ou
Twain côtoient des auteurs d’aujourd’hui comme Nina Allan ou Vollmann) et évite
toutes les œillères puisque l’avant-garde pointue – Arno Schmidt- cohabite avec
le journalisme gonzo d’Hunter Thompson et les frasques d’Hollywood décrites par
Kenneth Anger. S’il fallait trouver un fil conducteur, ce serait peut-être le
rock’n roll et sa réputation de musique « mal élevée ». De nombreux
textes tournent autour de la figure du critique musical Lester Bangs et l’on
trouvera également Le Journal de Nathan
Adler de David Bowie et un entretien avec Patti Smith.
Si Lester Bangs pourrait
apparaître comme l’âme damnée de la maison Tristram, c’est parce qu’il a
pratiqué l’exercice de la critique en flibustier, indifférent aux phénomènes de
mode et au bon goût dominant. Pour les éditeurs comme pour Bangs, il s’agit à
la fois d’affirmer des choix forts et de continuer à explorer les chemins de
traverse. C’est peu dire qu’on souhaite que leur route soit encore longue…
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48- Bloody Mary
(2003) de Jean-Pierre Bouyxou (Editions Les Ateliers du Tayrac, 2008)
Bloody Mary est, à l’origine, une pièce sonore écrite pour France-Culture.
Florimond traîne son ennui dans les bars malfamés et rencontre un beau jour Vlad
à qui il confie son désir de se suicider. Mais avant de commettre l’acte fatal,
il souhaiterait emporter avec lui un « mec nuisible » : « Je ne sais pas…un mec nuisible, quoi. Un
dictateur…ou un flic… C’est pas les ordures qui manquent, y a le choix. Ca
rendrait service à la société, non ? » Vlad va tenter de le
convaincre d’être plus ambitieux dans ses choix.
Même si le format de ce court récit
dialogué ne lui permet pas d’être très ambitieux, il s’avère très plaisant.
Bouyxou a le sens des répliques qui cinglent et son découpage très
cinématographique empêche le moindre ennui. On y retrouvera également ses
obsessions et ses amours pour le vampirisme, pour un art populaire hanté par l’idée
de subversion et pour un certain penchant pour le Grand Guignol (le finale que
je ne révèlerai pas). Une jolie réussite, en somme…
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49- Mille et un regrets (2017) de Philippe Dumas et Alain Paucard
(Editions Jean-Cyrille Godefroy, 2017)
Alain Paucard est décidément le
plus prolifique des écrivains. Quelques mois après son délicieux Eloge du cocu, le voilà qui nous revient
avec un projet étrange entre la conversation de bistrot et la bande dessinée.
Il s’agit, en effet, d’une succession de vignettes nostalgiques (une longue
litanie de « nous, on regrette » au choix : « les
banquettes en bois verni des wagons de métro », « la correspondance »,
« les hercules de rue, les cracheurs de feu, les mangeurs de sabre... »…)
donnant lieu à une petite illustration. Comme toujours avec Paucard, on n’est
pas obligé d’être d’accord avec lui pour goûter à sa littérature. On n’est donc
pas obligé de regretter « l’autorité que conférait l’uniforme » pour
apprécier cet hymne au Paris d’antan et à un certain art de vivre aujourd’hui
disparu. Alors « réacs », ce Paucard et ce Dumas ? Sans doute,
mais est-ce que le progrès promis par la sortie du dernier IPhone ou le
libéralisme à tout crin d’un Macron est forcément plus aimable ? Rien n’est
moins sûr…
Libellés : Angoisse, Bouyxou, Guégan, Le Sagittaire, Paucard, Tristram
1 Comments:
Franchement vous êtes formidable d'avoir fait un site pareil,
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