La cave du Dr Orlof

Notes en vrac

jeudi, octobre 10, 2019

Libertinage à l'italienne


Pornostar (1983/1984) de Giovanni Romanini (Éditions Dynamite, 2019)


Faute de place chez moi et sans doute d’un intérêt suffisant, je ne me suis jamais laissé tenter par les « fumetti », ces BD italiennes populaires imprimées en petit format sur du papier de mauvaise qualité et faisant la part belle à tous les « mauvais genres » (le fantastique gothique, l’horreur sanglante, l’érotisme le plus racoleur…). Ces albums firent les beaux jours des mythiques éditions Elvifrance qui eurent droits à de superbes hommages d’auteurs passionnants comme Bernard Joubert (qui signe ici la captivante préface du recueil) ou Christophe Bier.
Les éditions Dynamite (le label BD érotiques de La Musardine) ont aujourd’hui l’excellente idée de lancer une collection « fumettix » et de rééditer des recueils de ces planches mal famées. Pour ouvrir le bal, le choix s’est porté sur Giovanni Romanini, un dessinateur connu pour sa collaboration avec Magnus qu’il épaula sur de fameuses séries comme Kriminal ou Satanik. Les amateurs connaissent également ses albums Les Aventures de la Cicciolina et Dodo, la petite pensionnaire (adapté au cinéma par Francis Leroi).
En 1983, il fait paraître les premières aventures de Beba, une star du cinéma porno, et sa sœur Fiona qui deviendront par la suite les héroïnes de sa série Pornostar.
Les trois épisodes regroupés ici me semblent assez caractéristiques (je mets cette supposition au conditionnel car je ne suis pas un spécialiste !) des fumetti érotiques en ce sens qu’il s’agit de pornographie brute de décoffrage qui se développe sur des scénarios élaborés à la truelle. Rien ne distingue ces histoires de la routine des films X avec plombiers testiculeux toujours prompts à boucher n’importe quel trou et facteurs libidineux incapables de trouver la boite aux lettres ! Outre les scènes convenues sur les tournages, Romanini invente quelques péripéties vite conçues, vite résolues à base d’enlèvements, de trafics de drogue ou de vol de bijoux. Le trait est assez réaliste, relativement vivant en dépit de son caractère plutôt fruste.
Une fois dit tout ceci, et sachant que l’ouvrage s’adresse à un public averti, il n’est pas interdit de trouver un certain charme à l’ensemble. A l’heure où la pornographie est disponible partout, en quelques clics, ces BD antédiluviennes fleurent bon les années 80 et les kiosques de gare. Tout est grossier voire phallocrate (les personnages féminins se pâment systématiquement dès qu’elles croisent un mâle possédant forcément une mâchoire carrée et un membre surdimensionné), les scènes pornographiques sont archi-convenues mais on ne peut pas s’empêcher de penser que ce côté « vintage » ne sera jamais aussi beauf et vulgaire qu’une bande-dessinée de Marsault ! De plus, la pornographie de Romanini se révèle souvent moins conformiste que la plupart des films X de l’époque dans la mesure où elle ménage toujours un passage de sexe homosexuel voire même, dans le troisième épisode, un rôle déterminant à un personnage hermaphrodite. Cela ne fait pas tout mais c’est à noter.
Et c’est donc avec curiosité et impatience que l’on attend la suite de cette collection « Fumettix »…

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