Libertinage à l'italienne
Pornostar
(1983/1984) de Giovanni Romanini (Éditions Dynamite, 2019)
Faute de place chez moi et
sans doute d’un intérêt suffisant, je ne me suis jamais laissé tenter par les
« fumetti », ces BD italiennes populaires imprimées en petit format
sur du papier de mauvaise qualité et faisant la part belle à tous les
« mauvais genres » (le fantastique gothique, l’horreur sanglante,
l’érotisme le plus racoleur…). Ces albums firent les beaux jours des mythiques
éditions Elvifrance qui eurent droits à de superbes hommages d’auteurs
passionnants comme Bernard Joubert (qui signe ici la captivante préface du
recueil) ou Christophe Bier.
Les éditions Dynamite (le
label BD érotiques de La Musardine) ont aujourd’hui l’excellente idée de lancer
une collection « fumettix » et de rééditer des recueils de ces
planches mal famées. Pour ouvrir le bal, le choix s’est porté sur Giovanni
Romanini, un dessinateur connu pour sa collaboration avec Magnus qu’il épaula
sur de fameuses séries comme Kriminal
ou Satanik. Les amateurs connaissent
également ses albums Les Aventures de la
Cicciolina et Dodo, la petite
pensionnaire (adapté au cinéma par Francis Leroi).
En 1983, il fait paraître
les premières aventures de Beba, une star du cinéma porno, et sa sœur Fiona qui
deviendront par la suite les héroïnes de sa série Pornostar.
Les trois épisodes regroupés
ici me semblent assez caractéristiques (je mets cette supposition au
conditionnel car je ne suis pas un spécialiste !) des fumetti érotiques en
ce sens qu’il s’agit de pornographie brute de décoffrage qui se développe sur
des scénarios élaborés à la truelle. Rien ne distingue ces histoires de la
routine des films X avec plombiers testiculeux toujours prompts à boucher
n’importe quel trou et facteurs libidineux incapables de trouver la boite aux
lettres ! Outre les scènes convenues sur les tournages, Romanini invente
quelques péripéties vite conçues, vite résolues à base d’enlèvements, de
trafics de drogue ou de vol de bijoux. Le trait est assez réaliste,
relativement vivant en dépit de son caractère plutôt fruste.
Une fois dit tout ceci, et
sachant que l’ouvrage s’adresse à un public averti, il n’est pas interdit de
trouver un certain charme à l’ensemble. A l’heure où la pornographie est
disponible partout, en quelques clics, ces BD antédiluviennes fleurent bon les années
80 et les kiosques de gare. Tout est grossier voire phallocrate (les
personnages féminins se pâment systématiquement dès qu’elles croisent un mâle possédant
forcément une mâchoire carrée et un membre surdimensionné), les scènes
pornographiques sont archi-convenues mais on ne peut pas s’empêcher de penser
que ce côté « vintage » ne sera jamais aussi beauf et vulgaire qu’une
bande-dessinée de Marsault ! De plus, la pornographie de Romanini se
révèle souvent moins conformiste que la plupart des films X de l’époque dans la
mesure où elle ménage toujours un passage de sexe homosexuel voire même, dans
le troisième épisode, un rôle déterminant à un personnage hermaphrodite. Cela
ne fait pas tout mais c’est à noter.
Et c’est donc avec curiosité
et impatience que l’on attend la suite de cette collection
« Fumettix »…
Libellés : bande dessinée, Fumetti, Pornographie
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