Plongeons sans hésitations
Jeanne Cherhal. L’eau
J’ai découvert Jeanne Cherhal à la Cigale, en première partie du concert magique de Thomas Fersen. Seule derrière son piano, elle avait réjoui la salle par son humour un brin décalé et ses textes frappant juste. C’était juste avant la sortie de son premier album studio (douze fois par an) et j’ai tout de suite succombé au charme de Jeanne (vous permettez que je vous appelle Jeanne ?). Je me suis donc rué sur son nouvel album, l’eau, qui marque une réelle rupture avec ses deux précédents CD (le premier était la captation d’un concert).
C’est d’ailleurs amusant car celle que nous pouvions considérer comme une petite cousine de Vincent Delerm (ou une copine de fac !) semble suivre le même parcours et quitte au même moment que lui les sentiers désormais un peu éculés des arrangements piano/voix.
Soyons franc : j’ai été plutôt déconcerté par la première écoute du disque et il m’a dans un premier temps déçu. Peut-être qu’inconsciemment, nous attendons des artistes que nous aimons qu’ils nous servent ce que nous attendons d’eux. Or Jeanne Cherhal fait à peu près l’inverse. C’est donc en le réécoutant qu’on finit par accepter ces nouvelles données et qu’on goûte pleinement les nombreuses richesses de cet album.
Puisqu’il faut débuter par quelque chose, contentons-nous d’une banalité : le thème principal de l’œuvre est l’eau (où va-t-il chercher tout ça, vous demandez-vous avec stupéfaction ?). L’eau qui apaise et qui offre l’image d’une certaine plénitude quand tout va bien ; ou, au contraire, une eau qui vient à manquer lorsque les sentiments se dessèchent et qu’elle quitte le corps (les larmes, of course).
Le premier titre de l’album s’intitule Canicule. Etrange morceau où domine le son obsédant de la basse et où la belle Jeanne pose sa voix d’une manière assez magistrale (contrairement à Vincent Delerm, Jeanne Cherhal a une très, très belle voix qu’elle utilise avec beaucoup de virtuosité même si elle abusait de ses effets dans son premier album où elle s’approchait dangereusement, à certains moments, des brailleuses canadiennes dont je ne citerai pas le nom pour ne pas que la haute tenue culturelle de ces pages soit prise en défaut !).
Arrangements originaux (co-signés par l’excellent Albin de la Simone qui était déjà à l’origine des superbes arrangements des Erotiques, le très bon deuxième album de Bastien Lallemant), textes accrocheurs, chant très travaillé : Jeanne Cherhal va respecter ce programme le temps de ses treize nouveaux titres.
Parmi ces titres, deux (Le tissu et On dirait que c’est normal) semblent avoir été écrits par la chanteuse afin de payer son tribut à la chanson « engagée » qui n’engage à rien. Les morceaux, pas laids d’ailleurs, s’en prennent respectivement au port du voile islamique et à l’excision. Mhouaip ! Je n’entrerai pas dans le jeu des réactionnaires qui, sous prétexte de fustiger le « politiquement correct », cautionnent ces pratiques barbares mais il me semble que ces textes sont à peu près aussi utiles qu’un pansement sur une jambe gangrenée. Je n’aime surtout pas le côté pleurnicherie féministe (nos sœurs opprimées !) alors qu’on sait bien que ce sont les femmes qui participent le plus à l’éducation des enfants et qui transmettent de génération en génération ce respect criminel pour la religion et les traditions archaïques. Je préfère lorsque Jeanne Cherhal rend un hommage individuel aux avancées incontestables qu’ont permis un certain nombre de femmes comme dans le superbe Merci.
Si d’un point de vue instrumental, l’eau s’éloigne considérablement des premiers essais de l’auteur compositeur (« auteure compositrice »?) (écoutez le très « rock » La peau sur les os, une merveille ; ou le curieux L’eau, saturé de percussions et qui évoque le Gainsbourg de New York-USA) ; les thèmes qu’il aborde sont assez similaires. Jeanne Cherhal parle d’amour, de désir et de leurs aléas pour une jeune femme de son époque. Naissance du désir (le très tendre Tu m’attires), difficulté de s’accepter (je suis liquide) et de vivre à deux. Autour de ses motifs se détache l’extraordinaire morceau (sans doute mon préféré) intitulé Une tonne. Arrangée comme un morceau de comédie musicale, cette chanson à la fois très drôle et extraordinairement impudique raconte le quotidien d’une jeune femme boulimique et dépressive sauvée par l’amour.(C’était l’époque où à midi/ Je déjeunais de queues d’agneau/ J’en avalais des panoplies/ Et je dégueulais en sanglots/ Souvent le soir un vieil ennemi/ Venait m’escalader le dos…). La voix de Jeanne Cherhal fait ici merveille et fait vibrer le titre d’un écho très troublant.
C’est, à mon avis, le sommet d’un album par ailleurs parfaitement réussi et qui mérite le détour…
J’ai découvert Jeanne Cherhal à la Cigale, en première partie du concert magique de Thomas Fersen. Seule derrière son piano, elle avait réjoui la salle par son humour un brin décalé et ses textes frappant juste. C’était juste avant la sortie de son premier album studio (douze fois par an) et j’ai tout de suite succombé au charme de Jeanne (vous permettez que je vous appelle Jeanne ?). Je me suis donc rué sur son nouvel album, l’eau, qui marque une réelle rupture avec ses deux précédents CD (le premier était la captation d’un concert).
C’est d’ailleurs amusant car celle que nous pouvions considérer comme une petite cousine de Vincent Delerm (ou une copine de fac !) semble suivre le même parcours et quitte au même moment que lui les sentiers désormais un peu éculés des arrangements piano/voix.
Soyons franc : j’ai été plutôt déconcerté par la première écoute du disque et il m’a dans un premier temps déçu. Peut-être qu’inconsciemment, nous attendons des artistes que nous aimons qu’ils nous servent ce que nous attendons d’eux. Or Jeanne Cherhal fait à peu près l’inverse. C’est donc en le réécoutant qu’on finit par accepter ces nouvelles données et qu’on goûte pleinement les nombreuses richesses de cet album.
Puisqu’il faut débuter par quelque chose, contentons-nous d’une banalité : le thème principal de l’œuvre est l’eau (où va-t-il chercher tout ça, vous demandez-vous avec stupéfaction ?). L’eau qui apaise et qui offre l’image d’une certaine plénitude quand tout va bien ; ou, au contraire, une eau qui vient à manquer lorsque les sentiments se dessèchent et qu’elle quitte le corps (les larmes, of course).
Le premier titre de l’album s’intitule Canicule. Etrange morceau où domine le son obsédant de la basse et où la belle Jeanne pose sa voix d’une manière assez magistrale (contrairement à Vincent Delerm, Jeanne Cherhal a une très, très belle voix qu’elle utilise avec beaucoup de virtuosité même si elle abusait de ses effets dans son premier album où elle s’approchait dangereusement, à certains moments, des brailleuses canadiennes dont je ne citerai pas le nom pour ne pas que la haute tenue culturelle de ces pages soit prise en défaut !).
Arrangements originaux (co-signés par l’excellent Albin de la Simone qui était déjà à l’origine des superbes arrangements des Erotiques, le très bon deuxième album de Bastien Lallemant), textes accrocheurs, chant très travaillé : Jeanne Cherhal va respecter ce programme le temps de ses treize nouveaux titres.
Parmi ces titres, deux (Le tissu et On dirait que c’est normal) semblent avoir été écrits par la chanteuse afin de payer son tribut à la chanson « engagée » qui n’engage à rien. Les morceaux, pas laids d’ailleurs, s’en prennent respectivement au port du voile islamique et à l’excision. Mhouaip ! Je n’entrerai pas dans le jeu des réactionnaires qui, sous prétexte de fustiger le « politiquement correct », cautionnent ces pratiques barbares mais il me semble que ces textes sont à peu près aussi utiles qu’un pansement sur une jambe gangrenée. Je n’aime surtout pas le côté pleurnicherie féministe (nos sœurs opprimées !) alors qu’on sait bien que ce sont les femmes qui participent le plus à l’éducation des enfants et qui transmettent de génération en génération ce respect criminel pour la religion et les traditions archaïques. Je préfère lorsque Jeanne Cherhal rend un hommage individuel aux avancées incontestables qu’ont permis un certain nombre de femmes comme dans le superbe Merci.
Si d’un point de vue instrumental, l’eau s’éloigne considérablement des premiers essais de l’auteur compositeur (« auteure compositrice »?) (écoutez le très « rock » La peau sur les os, une merveille ; ou le curieux L’eau, saturé de percussions et qui évoque le Gainsbourg de New York-USA) ; les thèmes qu’il aborde sont assez similaires. Jeanne Cherhal parle d’amour, de désir et de leurs aléas pour une jeune femme de son époque. Naissance du désir (le très tendre Tu m’attires), difficulté de s’accepter (je suis liquide) et de vivre à deux. Autour de ses motifs se détache l’extraordinaire morceau (sans doute mon préféré) intitulé Une tonne. Arrangée comme un morceau de comédie musicale, cette chanson à la fois très drôle et extraordinairement impudique raconte le quotidien d’une jeune femme boulimique et dépressive sauvée par l’amour.(C’était l’époque où à midi/ Je déjeunais de queues d’agneau/ J’en avalais des panoplies/ Et je dégueulais en sanglots/ Souvent le soir un vieil ennemi/ Venait m’escalader le dos…). La voix de Jeanne Cherhal fait ici merveille et fait vibrer le titre d’un écho très troublant.
C’est, à mon avis, le sommet d’un album par ailleurs parfaitement réussi et qui mérite le détour…
Libellés : Chanson française, Cherhal, Delerm
4 Comments:
aime pas
Merci pour ce billet très agréable… et souriant (pour un sujet pas évident) !
Bonjour
J’adore vraiment ce que vous faites je me demande comment j'ai pu rater votre blog <3
C’est pour la première que je viens de visiter votre site et je le trouve vraiment intéressant ! Bravo !
Voyance gratuite
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