K comme Kierkegaard
Le journal du séducteur de Sören Kierkegaard (Folio essais. 2005)
En abordant la lettre K, je pressentais que mon choix devrait se porter soit sur des philosophes allemands dissertant sur la raison pure et pratique, soit sur des écrivains tchèques tourmentés, soit sur des philosophes danois. Bref : pas question de gaudriole en passant par la case K (je me réserve le génial Karl Kraus pour un prochain abécédaire) ! Si j’ai finalement opté pour Kierkegaard, c’est parce que depuis l’adaptation qu’en a tirée Danièle Dubroux (à l’époque, elle faisait encore des films regardables !) , je voulais absolument lire ce Journal du séducteur. C’est chose faite et j’en suis heureux !
Par contre, autant vous prévenir de suite, la présente note sera courte car vous parler de la philosophie de Kierkegaard dépasse largement le seuil de mes compétences !
Comme le Sur le rêve de Freud, l’intérêt du journal du séducteur est qu’il s’inscrit dans le champ d’une discipline précise (la philosophie) sans pour autant inonder le lecteur sous un flot jargonnant de concepts abscons. Au contraire, l’auteur présente sa pensée sous une forme quasiment romancée puisqu’on y suit, par le biais d’un journal intime, les tentatives machiavéliques d’un jeune homme (Johannes) pour séduire une jeune fille innocente (Cordélia).
Même si le livre se réfère à des événements concrets (repérage de la proie féminine, tentatives d’approche, séduction de son entourage – une tante- et ruses pour distiller peu à peu dans le cœur de la victime le doux venin de la passion amoureuse…), Kierkegaard privilégie avant tout les méditations de son héros plutôt que «l’événementiel ». Le récit se déroule au gré des observations et réflexions de Johannes sur le seul sujet qui l’intéresse : l’amour (et ses corollaires : le désir, la jouissance, le couple…).
Le jeune homme n’est pas un Don Juan mais un esthète. C’est moins l’esprit de conquête et de défi qui le meut qu’une volonté de jouir de chaque instant de son entreprise de séduction. « Aimer une seule est trop peu ; aimer toutes est une légèreté de caractère superficiel ; mais se connaître soit même et en aimer un aussi grand nombre que possible, enfermer dans son âme toutes les puissances de l’amour de manière que chacune d’elles reçoive son aliment approprié, en même temps que la conscience englobe le tout, voilà la jouissance, voilà qui est vivre. » On percevra à travers cette citation la puissance subjective de l’individu chez Kierkegaard puisqu’il s’agit pour Johannes de trouver les meilleures solutions pour jouir de tous les stades de l’amour.
Les spécialistes vous diront sans doute aussi que le journal du séducteur est une parfaite illustration de ce premier stade (le stade esthétique) que le philosophe perçoit dans le développement des individus (les deux autres étant, - prenez des notes, futurs bacheliers -, le stade éthique et le stade religieux). Johannes vit son amour dans l’instant et ne peut concevoir sa relation amoureuse avec Cordélia que dans son immédiateté (« s’introduire comme un rêve dans l’esprit d’une jeune fille est un art, en sortir est un chef-d’œuvre. Mais ceci dépend essentiellement de cela »).
Cette conception donne lieu alors à la fois à une sombre manipulation où c’est Cordélia qui, finalement, se fourvoie elle-même et à une série de réflexions assez stimulantes sur l’amour, le mariage et la séduction considérée comme l’un des beaux-arts.
Pour aborder le philosophe (sincèrement, j’ai maintenant plutôt envie de lire son Traité du désespoir et ses autres écrits), cet essai romancé me paraît une excellente entrée en matière…
En abordant la lettre K, je pressentais que mon choix devrait se porter soit sur des philosophes allemands dissertant sur la raison pure et pratique, soit sur des écrivains tchèques tourmentés, soit sur des philosophes danois. Bref : pas question de gaudriole en passant par la case K (je me réserve le génial Karl Kraus pour un prochain abécédaire) ! Si j’ai finalement opté pour Kierkegaard, c’est parce que depuis l’adaptation qu’en a tirée Danièle Dubroux (à l’époque, elle faisait encore des films regardables !) , je voulais absolument lire ce Journal du séducteur. C’est chose faite et j’en suis heureux !
Par contre, autant vous prévenir de suite, la présente note sera courte car vous parler de la philosophie de Kierkegaard dépasse largement le seuil de mes compétences !
Comme le Sur le rêve de Freud, l’intérêt du journal du séducteur est qu’il s’inscrit dans le champ d’une discipline précise (la philosophie) sans pour autant inonder le lecteur sous un flot jargonnant de concepts abscons. Au contraire, l’auteur présente sa pensée sous une forme quasiment romancée puisqu’on y suit, par le biais d’un journal intime, les tentatives machiavéliques d’un jeune homme (Johannes) pour séduire une jeune fille innocente (Cordélia).
Même si le livre se réfère à des événements concrets (repérage de la proie féminine, tentatives d’approche, séduction de son entourage – une tante- et ruses pour distiller peu à peu dans le cœur de la victime le doux venin de la passion amoureuse…), Kierkegaard privilégie avant tout les méditations de son héros plutôt que «l’événementiel ». Le récit se déroule au gré des observations et réflexions de Johannes sur le seul sujet qui l’intéresse : l’amour (et ses corollaires : le désir, la jouissance, le couple…).
Le jeune homme n’est pas un Don Juan mais un esthète. C’est moins l’esprit de conquête et de défi qui le meut qu’une volonté de jouir de chaque instant de son entreprise de séduction. « Aimer une seule est trop peu ; aimer toutes est une légèreté de caractère superficiel ; mais se connaître soit même et en aimer un aussi grand nombre que possible, enfermer dans son âme toutes les puissances de l’amour de manière que chacune d’elles reçoive son aliment approprié, en même temps que la conscience englobe le tout, voilà la jouissance, voilà qui est vivre. » On percevra à travers cette citation la puissance subjective de l’individu chez Kierkegaard puisqu’il s’agit pour Johannes de trouver les meilleures solutions pour jouir de tous les stades de l’amour.
Les spécialistes vous diront sans doute aussi que le journal du séducteur est une parfaite illustration de ce premier stade (le stade esthétique) que le philosophe perçoit dans le développement des individus (les deux autres étant, - prenez des notes, futurs bacheliers -, le stade éthique et le stade religieux). Johannes vit son amour dans l’instant et ne peut concevoir sa relation amoureuse avec Cordélia que dans son immédiateté (« s’introduire comme un rêve dans l’esprit d’une jeune fille est un art, en sortir est un chef-d’œuvre. Mais ceci dépend essentiellement de cela »).
Cette conception donne lieu alors à la fois à une sombre manipulation où c’est Cordélia qui, finalement, se fourvoie elle-même et à une série de réflexions assez stimulantes sur l’amour, le mariage et la séduction considérée comme l’un des beaux-arts.
Pour aborder le philosophe (sincèrement, j’ai maintenant plutôt envie de lire son Traité du désespoir et ses autres écrits), cet essai romancé me paraît une excellente entrée en matière…
Libellés : Dubroux, Kierkegaard, philosophie
1 Comments:
Grâce à votre site je viens d’appendre plusieurs choses. Continuez !
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