La cave du Dr Orlof

Notes en vrac

mercredi, juillet 30, 2008

Bibliothèque idéale n°35 : la bande dessinée

Lagaffe nous gâte (1977) d’André Franquin (Dupuis. 1977)




Avec celle consacrée à la littérature jeunesse, la bande dessinée est sans doute la catégorie de la « bibliothèque idéale » qui a le plus mal vieilli. Publié en 1988, l’ouvrage a, effectivement, été rédigé avant l’éclosion de la « nouvelle BD » et l’on ne trouvera donc aucun de ces nouveaux albums qui ont renouvelé le genre sous la plume de Trondheim, Sfar, Satrapi, David B., Christophe Blain et beaucoup d’autres (songeons aussi aux talentueux dessinateurs de la bande à Tchô, que ce soit Zep, Tehem ou Boulet, une vieille connaissance !). On ne trouvera pas non plus de mangas (pourtant, Tanigushi…) ou certains grands noms de la BD américaine comme Art Spigelman (en 1988, Maus avait pourtant commencé de paraître en France).

Puisque le choix proposé ici est particulièrement académique (c’est d’ailleurs un peu le problème du livre !), nous nous sommes replongé dans les classiques.

Je dois vous confesser une chose : je ne suis pas un grand fan de Tintin (le boy scoutisme d’Hergé m’agace un peu, comme cette manière qu’a son héros asexué d’évangéliser les nègres ou les chinois !), ni d’Astérix (un petit peu trop franchouillard à mon goût), ni même de Lucky Luke (j’ai tendance à préférer au héros les vrais personnages mythiques qui ont existé et qui ont toute mon estime : les Dalton, Jesse James ou l’excellente Calamity Jane).

Attention, je ne nie en aucun cas le talent (voire le génie) des dessinateurs et scénaristes qui ont concocté ces séries mythiques mais aucune n’arrivera à détrôner dans mon cœur les aventures de Gaston Lagaffe, le plus sympathique héros de BD de tous les temps.

Je suis mal placé, n’étant pas un grand spécialiste de la bande dessinée, pour vous parler de ce fabuleux auteur que fut Franquin (j’ai été marqué, adolescent, par ses sublimes Idées noires) et de la qualité de son trait.

Par contre, je pourrais (je ne le ferai pas, rassurez-vous !) être intarissable dans mes éloges de son héros.

Gaston, c’est le héros de BD qui a appliqué avec le plus de talent le célèbre adage de Raoul Vaneigem : « Apprenez à créer, ne travaillez jamais ». Si notre hilarant hurluberlu a une sainte horreur de son travail de bureau qui le pousse à roupiller le plus souvent et à amasser des tonnes de courrier en retard ; il s’applique, de la même manière, à inventer les gadgets les plus farfelus, les plus insolites et les plus poétiques. Car Gaston est un poète, un doux rêveur et un véritable anarchiste. Ô ! Ce n’est pas Ravachol ni un adepte de la propagande par le fait (encore que dans Lagaffe nous gâte, une de ses inventions se transforme malencontreusement en explosif et menace dangereusement la voiture présidentielle !) mais il ne se prive jamais de faire tourner en bourrique la maréchaussée (cet inénarrable flic auquel il est sans arrêt confronté) et de ruiner les parcmètres ; de gâcher régulièrement les contrats des gros commerciaux (l’inénarrable De Maesmaker) et de lutter contre l’abrutissement des tâches quotidiennes.

Dans un autre album que j’ai acheté dans la foulée (Lagaffe mérite des baffes), on ressent également les préoccupations écologistes de Franquin (Lagaffe est le grand ami des bêtes) et, chose rare, nous voyons Gaston s’agacer des gadgets militaires vendus avec les albums de Spirou !

Inutile d’aller plus loin : vous avez compris que j’ai pris un énorme plaisir à redécouvrir les aventures de Gaston que je n’avais point relues depuis ma tendre enfance (je pense d’ailleurs me racheter toute la collection !) et de retrouver tous ces personnages mythiques (les collègues Prunelle et Lebrac, la belle Mademoiselle Jeanne, le voisin Jules…) et ces inventions (le gaffophone) et divers objets (le bilboquet, la boule de bowling…) à l’origine de nombreuses gaffes.

Gaston, c’est la paresse inventive, l’anarchie douce et la poésie incarnées. Un personnage unique dont les aventures n’ont pas pris une ride tant elles resplendissent du sourire malicieux de l’enfance.

NB : Je pense que certains de mes (rares) lecteurs fans de BD vont se faire plaisir dans cette catégorie alors n’hésitez pas : quelle(s) bande(s) dessinée(s) pour la « bibliothèque idéale » ?

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8 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Me sentant comme interpellé par ton invitation, je réponds sans beaucoup hésiter : les dix premiers Gil Jourdan, de Maurice Tillieux, parus chez Dupuis entre 1959 et 1967. Ces dix albums mélangent subtilement la narration d'enquêtes policières qui comportent leurs moments de tension dramatique aiguë et leurs scènes d'atmosphère très suggestives, et la fantaisie verbale la plus débridée... Le dessin, un semi-réalisme parfois franquinien et généralement très libre, toujours très séduisant pour l'oeil, assure la cohérence de cet univers volontairement contradictoire.
D'autre part, contrairement à toi, cher Docteur, j'admire énormément Goscinny, qui a su instiller dans ses « Astérix », comme dans les meilleurs des « Lucky Luke » qu'il a scénarisés, toute une philosophie et toute une psychologie - tout autant que l'a fait Franquin dans Gaston.
Autres bandes dessinées qui plaisent à mon goût éclectique : « 120, rue de la Gare » de Tardi (d'après Léo Malet), « La mine de l'Allemand perdu » et « Le spectre aux balles d'or » de Giraud et Charlier, « Griffu » de Tardi et Manchette, « Batman dark knight » de Miller, « L'encyclopédie des bébés » de Goossens, « Comanche » d'Hermann et Greg, « Les Celtiques » d'Hugo Pratt, « Les épatantes aventures de Jules » par Émile Bravo, etc., etc. Mais une liste non commentée n'a guère de signification... Désolé !

1:37 AM  
Anonymous Anonyme said...

S'il n'y en avait qu'un ce serait La marque jaune du grand Jacobs, mais j'aurais pu prendre le premier de l'impressionnante pile des album à lire et qui vascille prés de mon lit où l'on trouve le chat du rabin, le dernier Lefranc, le dernier Zipang peut être la meilleur uchronie que j'ai pu lire, un lapinot le seul qui me manquait, les Agrippine que le nouvel obs a la bonne idée de republier ou alors ceux que je vient de lire: Eagles autre brillant manga uchronique, walking dead formidable histoire de zombis (5 tomes parus),... et s'il y en avait deux Au temps de Botchan une sorte de panorama des intellectuels japonais au début du 20 ème siècle,un peu si on vous racontait la naissance de la nrf en BD, c'est dessiné par Taniguchi chaque case est une merveille... Tous les auteur que tu as cité font mon bonheur plus Alix de ce cher Jacques Martin. Je relis régulièrement mes Spirou et mes Tintin ainsi que les Tardi et les premier Billal et Gaston bien sur. Les Gil Jourdan sont un bon choix mais il y a aussi tellement de BD méconnues, Bobo, La ford T, les Zorilles, les corentin... Et j'allais oublier l'immense Tezuka avec Les trois adolphes (une formidable saga historique)... Je suis toujours abonné au journal de Spirou qui récemment nous a donné une merveille avec Le petit lézard géant de Libon...
Je suis assez d'accord avec noctémédia sur Goscinny (et complètement pour Tillieux) en ce qui me concerne j'ai une tendresse particulière pour Oumpapah dessiné pour le journal Tintin avant la création d'Astérix

Bernard Alapetite

6:52 PM  
Anonymous Anonyme said...

Figure-toi que j'ai eu une période ou j'étais encore plus bédéphile que cinéphile. Si.
Alors, c'est dire si les titres se bousculent au portillon. Goscinny me semble un indispensable. "Astérix en Corse" est un sommet : "Il s'y prend comme ça pour cueillir le gui ? Oui, il attend qu'il tombe". Comme toute la série qu'il a écrite pour le Lucky Luke de Morris. "Quand est-ce qu'on mange ?" ; "Je le hais je le hais"... c'est comme les dialogues des films de Sergio Léone. Comme Oumpahpah, comme les dingodossiers, comme tout le reste.
Mais J'adore aussi Hergé avec qui j'ai grandit et Franquin qui est peut être mon préféré avec des albums comme "QRN sur Bretzelburg" et effectivement tout Gaston dont je ne me suis jamais lassé. Il faudrait citer beaucoup de monde, je pense à Jijé et son Jerry Spring, Tanguy et Laverdure, Pratt, Manara, Tardi, Palacios, Tillieux, Binet, Jacobs, Gotlib, la bande de Fluide Glacial, celle de Métal Hurlant, les grands américains comme Crumb, Kirby, Buscema, Caniff, Eisner... Noctemadia a raison, c'est une liste sans grande signification mais c'est vraiment très long à commenter.
Si je devais recommander quelque chose d'aujourd'hui, ce serait sans doute Larcenet, ma grande découverte de ces dernières années, avec les trois albums du "Combat ordinaire". Et en moins connu, les albums de Joe Matt pas très loin du grand Crumb, drôle, personnel et féroce.

9:17 AM  
Anonymous Anonyme said...

Eh bien voilà! J'ai bien eu les trois bédéphiles que j'attendais!

Noctemedia : oui, j'aime aussi Goscinny et Tardi (ses illustrations pour les livres de Céline sont toujours splendides). Et j'ai également découvert avec plaisir Emile Bravo.

Bernard : Tu sais ce que je pense de Jacques Martin. Par contre, je suis ravi que tu défendes Libon qui a effectivement beaucoup de talent et, qui plus est, est un garçon fort sympathique.

Vincent : J'ai lu le premier tome du "Combat ordinaire" et j'avais beaucoup aimé. J'aurais effectivement pu citer Larcenet dans les talentueux auteurs nouvelle BD. Ca m'aurait permis de virer Sfar qui a signé le texte en faveur de Philippe Val!

1:50 PM  
Anonymous Anonyme said...

Ouah, j'arrive un peu après la bataille, mais je vais vite fait participer avec les BD qui en tant que dessinateur, m'ont fait redécouvrir le genre tout au long de mon apprentissage...

Dans les vieux classiques de l'enfance, je citerais comme toi les Gaston Lagaffe, pour les mêmes raisons, mais aussi les Tintin, ne t'en déplaise !
Hergé a réussi avec le même talent à explorer un nombre incalculable de voies, que ce soit le récit de piraterie avec "Rackham le rouge" ou la SF avec ses récits lunaires et "Vol 754 pour Sydney" (je ne suis plus sûr du numéro du vol en question !) voire le film catastrophe avec "l'étoile mystérieuse". Si j'ai un million de fois plus de sympathie pour le personnage de Gaston que pour celui de Tintin, il n'en demeure pas que c'est Hergé qui pour moi démontre le mieux que dans le récit, dans ce qu'on peut faire faire à un héros de BD, tout est possible. Je te recommande d'ailleurs "Les bijoux de la castafiore" qui est un récit pratiquement en huis clos façon mystère de la chambre jaune, et où bien qu'il ne s'y passe absolument rien, est un des albums les plus forts et les plus intrigants de la série.
Concernant la période ado,dans Fluide Glacial, il a déjà été cité, c'est bien entendu Goossens l'incontournable. J'ai aussi à cette époque découvert les débuts de Larcenet et de Blutch ("Mish-Mash", absolument indispensable dans la bibliothèque idéale !)
En parallèle, c'est l'époque où j'ai redécouvert Bill Watterson avec "Calvin et Hobbes", il FAUT avoir l'intégrale !
Dans les BD "adultes" c'est aussi le moment où j'ai découvert Moebius, l'intégrale de l'Incal doit figurer dans cette bibliothèque, mais je pense que c'est moins ton truc, c'est à la fois SF et ésotérique, je pense qu'il y a de très fortes chances pour que tu trouves ça très chiant.
Attention, il faut l'ancienne version, avec les superbes couleurs seventies, et surtout pas l'épouvantable réédition coloriée au photoshop qui est sortie il y a peu.

Après, ça a été l'éveil à la nouvelle BD... Me concernant, deux noms me viennent: Nicolas de Crecy ("Léon la Came", tu devrais aimer) et Trondheim ("Les formidables aventures de Lapinot" et "La Mouche"). A cette époque j'ai aussi plongé dans le manga: l'incontournable pour moi n'est pas le très très marginal Taniguchi (même s'il serait vraiment dommage de se passer de "Quartier Lointain") mais plutôt Otomo avec "Akira", et, même si le film a pas mal occulté l'existence de la BD, "Nausicaa" de Miyazaki.

Dans la BD jeunesse plus grand public, les premiers Titeuf étaient une grande bouffée d'air frais (on sortait enfin de la représentation de l'enfance façon cartable-en-cuir-avec-la-règle qui-dépasse)et maintenant "Lou" de Julien Neel et "Captain Biceps" de Tébo font aussi à mon avis beaucoup de bien au genre !
Je rajouterais aussi "Toto l'ornithorynque" de Yoann et Omond

Enfin dans la "Nouvelle BD", les récits de voyage de Guy Delisle, "Isaac le pirate" de Christophe Blain, "Le chat du rabbin" de Sfar, "l'ascension du haut-mal" de David B. et "Les pilules bleues" de Peeters.

Voilà pour le "parcours"... Maintenant je veux bien te parler de ce que je lis en ce moment, mais là ça va devenir vraiment long !

12:53 AM  
Blogger gludure said...

Plonge toi d'office dans l'oeuvre de Francis Masse! Des bonhommes grotesques, gros tarins et chapeaux mous, representant de commerces ou golems, le doute plane, devisent doctement et absurdement de theories scientifiques.L'univers, échaudé par leurs fumeuses et neanmoins poétiques speculations, se déforme prodigieusement jusqu'a saturation, la'pataphysique s'immerge dans toutes les interstices!Grandiose et, comme tu le vois, difficilement explicable, c'est un résumé des "DEUX DU BALCON". PS :Francis Masse, dixit Gilliam, et une de ses influences pour son Brazil.

11:05 PM  
Blogger tyery1 said...

Voici ma petite contribution, et je vais donc citer quelques BD plus récentes car nous avons aussi des grands dessinateurs en devenir.
Alors je commence par la belle équipe Trondheim, Sfar et Larcenet pour leur série "donjon" ou quand les monty-python rencontrent conan le barbare.
Christophe Blain avec ces 2 série "Isaac le pirate" et "Gus" romance, aventure..on presque chez Dumas.
Et je ne peut pas parler BD sans évoquer Hugo Pratt non plus..ahhhh Corto Maltese...quelle classe.
Tardi je n'en parlerais pas d'autres l'ont fait bien mieux que moi un peu au-dessus.

Chez les américains, je n'oublierais pas Alan Moore pour "les watchmens" "v pour vendetta", "from hell", mais aussi son "batman :the killing joke" un auteur capable de dépoussiérer le genre bd de super-héros.

Voila et je finirais par le japonais "Tezuka" auteur d'énormément de mangas très connus (astro, blacjack, le roi leo...) mais également d'une autobiographie en bd en plusieurs tomes intitulée "autobiographie".

Et pour finir sur ce média qu'est internet de nombreux auteurs s'expriment à travers des blog BD, alors pour n'en citer qu'un ne ratez pas le blog de boulet : www.bouletcorp.com

10:19 PM  
Anonymous voyance par mail gratuit said...

Tu touches un point sensible là en effet je pense aussi que c’est un manque de confiance en moi.

5:13 PM  

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